Associé à la quête du plaisir et au luxe de la facilité et de la commodité, le confort du foyer, décrit comme l’une des réussites de la fin du xixe siècle, est avant tout attribué au talent des tapissiers. La meilleure illustration en est certainement le fauteuil tonneau, doté d’une assise avec un textile recouvrant les ressorts que l’on venait d’inventer1. Mais cet article se penche sur le rôle encore plus déterminant des fabricants de poêles, plombiers, chauffagistes et électriciens dans l’élaboration du confort de nos foyers. Car finalement, les sièges à ressorts des tapissiers ont bien moins contribué à notre idée contemporaine du confort domestique que les poêles, la plomberie intérieure, le chauffage central et l’éclairage électrique. Sans oublier non plus le fait que les progrès techniques réalisés dans ces domaines ont eu une influence décisive sur le mobilier et donc sur la création de nouveaux modèles de sociabilité2. En d’autres termes, la tendance moderne à l’individualisation domestique et à l’intimité personnelle n’existerait pas sans les efforts des corps de métier techniques du bâtiment.
Jusqu’à présent ignorées, leurs contributions, qui se matérialisent par les câbles, fils et conduits minutieusement dissimulés dans les cloisons et interstices du foyer, illustrent une histoire de classes où le personnel de maison, en tant que précurseur des commodités modernes, était lui aussi maintenu hors de la vue et relégué dans les coins isolés du logis. De nos jours, la dépendance domestique aux installations publiques urbaines demeure l’objet d’une ignorance cultivée, qu’il s’agisse du système d’égouts, des canalisations et de l’électricité, mais aussi des lignes téléphoniques et, plus récemment, du réseau de la fibre optique pour la transmission de la télévision et d’Internet. Même dans la rue, nous prenons rarement conscience de l’infrastructure qui se trouve sous nos pieds et permet de desservir chaque logement. Au xxe siècle, nombre de ces équipements publics, tels que les réservoirs de gaz, les châteaux d’eau, les câbles électriques en surface et les antennes de toit, sont longtemps restés saillants dans le paysage urbain3. Certes, la grande quantité de câbles et de conduites d’approvisionnement et d’évacuation qui traversent les murs et les sols de nos habitations peut être effrayante, mais pourquoi persistons-nous à idéaliser, en dépit du bon sens, le concept d’un foyer autosuffisant et autonome ? Bien que cette question concerne la plupart des pays occidentaux, les Pays-Bas serviront ici d’exemple pour décrire le contexte historique lié à ce rêve du foyer autosuffisant. Un terrain d’observation d’autant plus intéressant que l’utopie de l’autarcie y est plus en vogue que jamais en raison de la crise énergétique actuelle.
L’idéal du foyer autosuffisant
Historiquement, l’idée d’autarcie domestique est en lien avec la société de classes du xixe siècle et, plus particulièrement, avec le rôle du personnel de maison dans les familles des classes moyenne et supérieure. Avant l’avènement des canalisations, les domestiques portaient les seaux d’eau dans les étages, de même qu’ils évacuaient les eaux usées. Les bonnes vidaient les pots de chambre et remplissaient les poêles et fourneaux de charbon, puis en évacuaient les cendres. Les gens de maison allumaient aussi les bougies et les lampes à huile lorsque l’éclairage n’était pas encore actionné par des interrupteurs. Avant l’arrivée du téléphone, les domestiques jouaient également le rôle de messagers et c’est à la force de leurs bras que la maison fonctionnait avant l’installation des appareils électriques. En somme, le personnel de maison était tout simplement la force invisible qui permettait aux foyers de tourner4.
Dans l’état d’esprit du xixe siècle, les domestiques ont contribué au confort de la maison et représentaient, en tant que tels, le statut du foyer. Ceci explique pourquoi leur nombre était pris en compte dans l’impôt néerlandais sur la fortune et le confort domestique lorsqu’il a été introduit en 1805. L’impôt prélevé était aussi calculé sur la base du nombre de fenêtres, de portes d’entrée et de cheminées5. Le décompte d’ouvertures vers l’extérieur constituait un indicateur clair de la grandeur, au sens propre et figuré, de la maison. L’abondance de baies vitrées apportait davantage de lumière dans les pièces et les multiples portes d’entrée permettaient de marquer l’essentielle séparation des classes en faisant la distinction entre livreurs et visiteurs de la demeure6. Si la position des vitrages et accès était prévue par les architectes, il en était de même pour l’emplacement des quartiers des domestiques. Depuis le xviie siècle, les résidences des riches familles néerlandaises étaient équipées de cuisines séparées, situées au sous-sol ou à l’arrière de la maison, pour préparer les repas et faire la vaisselle Fig. 1.
La division spatiale entre la cuisine, territoire des gens de maison, et les lieux de vie de la famille renforçait la distance sociale entre les classes. Pendant la journée, les domestiques restaient dans la cuisine ; la nuit, ils dormaient dans des chambres sommaires situées au grenier. Au xixe siècle, les maisons de ville et de campagne possédaient des escaliers et des accès séparés pour les employés afin d’éviter le plus possible la rencontre avec les occupants7. Ce jeu de cache-cache social a donné naissance à d’ingénieuses constructions de portes dissimulées pour « permettre » aux bonnes de faire le ménage sans être vues. Progressivement, les domestiques, devenus invisibles, disparaissent derrière les murs ou sous les planchers, notamment dans les cuisines de sous-sol.
En outre, dans les demeures du xixe siècle, les premières installations électriques contribuent à l’imperceptibilité des domestiques8. Le porte-voix et, plus tard, l’interphone intérieur permettent à la maîtresse de maison de donner des instructions et de communiquer avec ses employés dans la cuisine. De cette manière, elle pouvait limiter au maximum le contact physique avec la classe inférieure, réputée dangereuse. La sonnette électrique, associée à un tableau indiquant dans quelle chambre le service était sollicité, est également une technologie apparue à la fin du xixe siècle9. Dès le début, le câblage de ces installations dans les espaces de vie de la famille était dissimulé dans les moulures décoratives en bois10. L’équipement de commodités modernes dans les foyers de la classe supérieure reflétait les inégalités sociales dans la société de classes du xixe siècle, puisque l’on voit que les quartiers des gens de maison n’en ont pas bénéficié au départ.
La crise internationale de la domesticité
Le statut de domestique souffrant d’une certaine dévalorisation sociale, les « bonnes » n’ont de toute évidence pas tardé à démissionner lorsque d’autres opportunités professionnelles se sont présentées, la plupart du temps en usine. Autrefois considéré comme le travail le plus respectable qui soit pour une jeune fille de la classe laborieuse, le service domestique perd tout attrait par rapport aux horaires fixes des emplois de bureaux et des usines. C’est d’abord dans les villes américaines que la pénurie du personnel de maison devient un réel problème social. Au tournant du xxe siècle, elle se mue en une véritable crise internationale de la domesticité, affectant la plupart des pays d’Europe occidentale. Seule l’Allemagne n’en a peut-être pas subi les effets, la crise économique qui suit sa défaite lors de la Première Guerre mondiale force les jeunes filles allemandes instruites à partir travailler en tant que bonnes pour des familles étrangères, principalement néerlandaises. Menaçant le confort des classes aisées, la pénurie de domestiques était tellement alarmante que toutes sortes d’idées sont apparues pour y faire face.
Deux types d’initiatives ont principalement émergé, parallèlement à des idéologies politiques distinctes des questions sur les futurs modes de vie à la maison. La première se basait sur des initiatives ou des idées inspirées par le socialisme et visait à promouvoir des installations urbaines collectives en phase avec celles créées pour les classes ouvrières, telles que les bains publics et les lavoirs11. Même si les classes aisées avaient souvent eu recours à la sous-traitance pour les tâches ménagères spécialisées, celles-ci étaient toujours réalisées à la maison et non sur un site public. En faisant accepter la sous-traitance des corvées quotidiennes, comme la cuisine et le ménage, aux classes supérieures, encore fallait-il assurer la livraison à domicile. Une des initiatives, suivant des exemples américains, consistait à construire des hôtels à appartements luxueux contenant des logements de taille moyenne qui ne possédaient ni salle à manger ni cuisine. L’ensemble des services à domicile, tels que le ménage et la blanchisserie, ainsi que le restaurant collectif, étaient gérés par une équipe professionnelle mixte12 Fig. 2.
En prônant la construction d’hôtels à appartements en 1906, l’architecte néerlandais Cornelis Rutten souligne l’efficacité et l’économie de la vie en logements collectifs avec la perspective de la montée du coût de l’emploi de domestiques. En effet, un employé ne pouvait pas suffire à maintenir un espace de vie confortable dans une grande maison. L’objectif de Rutten était de limiter le plus possible « l’aide extérieure » et de se passer de personnel à court terme13. Afin de pallier la pénurie de domestiques pour les ménages de la classe moyenne, des « cuisines coopératives de quartier », souvent couplées à un restaurant, avaient été créées pour fournir des repas à emporter ou livrés à domicile à ses membres. En outre, les classes moyennes s’appuyaient sur des modèles de cuisine efficaces et sur l’aide d’appareils ménagers électriques pour surmonter la crise de la domesticité 14. Au début des années 1920, la s avait bien résumé l’esprit de l’époque avec son slogan : « Laissez l’électricité vous aider quand les domestiques vous abandonnent ».
Le second type d’initiatives se basait sur un nouvel idéal de vie pastorale plus conservateur, apparu aux Pays-Bas parmi les classes aisées de la fin du xixe siècle. Les riches citadins quittaient la ville pour s’installer dans de nouvelles constructions nichées dans les bois et se rendaient à leur travail en voiture. L’emplacement isolé des villas, associé à l’idéal d’autosuffisance proclamé de leurs habitants, nécessitait la privatisation des stations de pompage, des sources d’alimentation électrique et du système d’évacuation, sous la forme de fosses septiques enterrées15.
Ces villas à la campagne ont été les premières à bénéficier des commodités domestiques modernes telles que l’électricité et le chauffage central. Priorité était donnée à l’illusion d’une nostalgie comme en témoignent les magnifiques cheminées dans les pièces principales de la maison dont les radiateurs étaient donc dissimulés derrière les panneaux muraux. Le fantasme de l’auto-suffisance complétait à merveille l’idée d’un foyer doté de l’électricité et sans domestiques. En réalité, il s’avérait pourtant très difficile de gérer une villa en l’absence de personnel. Les employeurs proposaient donc des logements luxueux dans une aile distincte de leur maison pour que des « filles de la campagne » acceptent de venir travailler pour eux. C’est ainsi que l’idéal du foyer en autarcie est peu à peu associé à l’intimité de la famille, vivant à l’abri du regard des gens de maison.
Les actions engagées pour affronter cette crise de la domesticité en collectivisant les habitats des classes moyenne et supérieure, comme la construction d’hôtels à appartements et la création de cuisines coopératives de quartier, rencontrèrent un franc succès, bien que de courte durée, pendant l’entre-deux-guerres. Les solutions privatives telles que les modèles de cuisines efficaces et l’aide des appareils ménagers électriques ont elles été plébiscités après la guerre. Si l’idéal de l’habitat pastoral autosuffisant est resté inexploité jusqu’au début des années 1970, il est aujourd’hui plus vivant que jamais, même dans un contexte urbain. Cette évolution s’illustre par les panneaux solaires sur les toits, les systèmes de chauffage privés exploitant la chaleur de la terre ou les poêles à bois, qui sont à la mode, mais moins écologiques16. La crise énergétique et la nécessité de solutions durables ont ravivé non seulement l’idéal du foyer autosuffisant, mais également les initiatives collectives de petite envergure, comme l’habitat groupé, les coopératives de logement, la cuisine pour les voisins ou le partage de véhicules.
Encore aujourd’hui, les emplacements dissimulés des chaudières de chauffage central sont les réminiscences contemporaines des anciens quartiers des domestiques, car elles sont habituellement situées au sous-sol, au grenier ou dans la cuisine. En outre, le câblage et la tuyauterie camouflés dans nos maisons contribuent à l’idée de l’autarcie et constituent, à ce titre, un rappel historique du destin du personnel qui faisait d’incessants allers et retours dans les escaliers dérobés. Une démarche du début des années 1930 visant à quantifier la puissance électrique utilisée par les foyers en nombre de domestique(s), en référence au nombre de chevaux des voitures, n’a cependant jamais abouti17. Si l’on avait pu traduire l’énergie déployée par les employés de maison en puissance cheval, on aurait créé un lien clair avec l’époque révolue où le nombre de domestiques indiquait le statut et la richesse d’un foyer. De nos jours, c’est le niveau de domotique qui est un marqueur plus parlant du confort recherché par un ménage, mais il n’existe aucune unité de mesure de l’automatisation pour l’instant.
Les appareils et affichages numériques modernes fonctionnent souvent sans fil, ce qui signifie que la référence historique aura bientôt disparu, même si la tendance récente à la décoration d’intérieur de style industriel a redoré le blason des câbles visibles, en particulier ceux de l’éclairage. La mode industrielle qualifiée de « masculine » remonte à la fin des années 1960, au temps où les artistes américains créaient des habitations et des studios simples, les fameux lofts, dans d’anciens bâtiments industriels situés dans les centres-villes. Au fil des décennies, le loft est devenu un type d’habitat chic, qui contribue encore à l’illusion de vivre dans un confort sommaire, sur des sols en béton brut, entre des murs de briques abîmés portant les traces d’une ancienne activité industrielle, telles que des canalisations et conduits apparents. L’habitat en loft actuel, débarrassé de ses aspérités, est devenu l’emblème d’un style de vie cosmopolite et exclusif réservé à une population jeune, riche et célèbre. Cette tendance, à une échelle toutefois plus modeste, recoupe les aspirations de nombreux ménages.
Illusions nostalgiques : de l’écran de cheminée à l’écran plan
Les cheminées présentes dans les pièces principales des villas néerlandaises de la fin du xixe siècle sont nées de l’illusion nostalgique de la vie rurale ou traditionnelle. Cette illusion se basait sur le modèle du hall d’une maison de campagne anglaise ou recréait un intérieur du xviie siècle, avec des copies historiques des manteaux de cheminée dans la salle à manger et le bureau. Grâce au chauffage central, la crainte d’attraper un rhume qui existait au temps de la cheminée traditionnelle est devenue de l’histoire ancienne. Les aménagements mobiliers restaient néanmoins traditionnels, puisque les fauteuils étaient toujours positionnés à proximité du foyer, protégés de la chaleur accablante d’un feu ardent. Différents types d’écrans pare-feu devaient protéger les tissus et les tapis des étincelles, et les visages des femmes de la déshydratation18. Le positionnement latéral à l’âtre des fauteuils a également été reproduit au xixe siècle, lorsque le poêle a quitté son emplacement d’origine, plutôt au centre de la pièce, pour se retrouver sous le manteau de cheminée Fig. 3. Les aménagements mobiliers traditionnels se sont avérés tenaces, comme l’illustre une des premières publicités pour le chauffage central, qui représente une femme assise près d’un radiateur et protégée par un écran, qui fait partie du panneau cachant l’appareil Fig. 4. La dissimulation des calorifères restait une référence à la position inférieure des anciens domestiques.
Lorsque le chauffage central a été installé dans les logements sociaux de l’après-guerre, les exigences d’efficacité thermique nécessitaient que les radiateurs ne soient pas cachés derrière les panneaux des murs intérieurs, mais placés en évidence en dessous de la fenêtre du salon. Sans le manteau de cheminée traditionnellement situé au centre, les nouveaux habitants ne savaient pas comment placer le mobilier. Le positionnement latéral fut au départ conservé, les fauteuils se retrouvèrent donc non seulement près du radiateur, mais également de la fenêtre, dont la proximité avait toujours été évitée en hiver. C’est donc l’arrivée de la télévision qui lève la confusion des habitants dans l’aménagement mobilier, en devenant le nouveau point central des salons néerlandais. Initialement, le « poste » exigeait lui aussi d’être placé près de la fenêtre pour être proche du câble externe filant le long de la façade jusqu’à l’antenne située sur le toit, mais aussi, et peut-être surtout, pour garder le câble de raccordement hors de la vue, niant sa dépendance à un système de radiodiffusion public.
Dès son installation dans le salon, la télévision échange son rôle avec celui du manteau de cheminée, en étant le nouvel autel de la maison, flanqué d’un napperon, d’un vase, d’une lampe et d’une photo encadrée. On reprend au départ le même positionnement latéral des meubles, avec les fauteuils de part et d’autre du poste de télévision. On les faisait pivoter devant l’écran lorsque l’émission commençait, ce qui créait une sorte de cinéma miniature19. Mais le déplacement des assises, avec l’allongement de la durée de diffusion des chaînes, devient contraignant. Parallèlement à l’évolution du mobilier, un nouvel agencement n’a pas tardé à conquérir une place privilégiée dans les salons néerlandais Fig. 5.
Lorsque la télévision câblée est apparue, le poste n’était plus enchaîné à son emplacement proche de la fenêtre, cependant, peu de ménages le déplacèrent. Dans la pure tradition de décoration intérieure des années 1970 et 1980, la technologie moderne devait être invisible, aussi dissimulait-on les téléviseurs dans un placard du mobilier mural spécialement prévu à cet effet dont les portes devaient être ouvertes pour regarder. De la même manière, on ouvrait les panneaux muraux pour profiter de la chaleur des appareils cachés derrière. La technologie visible gâchait l’illusion nostalgique des meubles traditionnels issus de l’ancien style néerlandais. Cher au cœur des ménages, celui-ci perpétuait une idée de souveraineté présente dans l’intérieur des villas et des maisons de campagne du xixe siècle Fig. 6.
Les proportions imposantes des écrans plats actuels les transforment en papiers peints interactifs en lieu et place des simples appareils – les postes de télévision – qu’ils furent, à condition que le câble reste invisible. On critique aujourd’hui les écrans divers de tailles variables qui ont envahi le salon, ordinateurs de bureau, portables, tablettes et smartphones – comme leur prédécesseur, ces écrans bleus – parce qu’ils nuiraient à la sociabilité : lorsqu’ils utilisent leurs appareils, les membres d’une famille se montrent à l’évidence plus attirés par le monde qui se trouve au-delà de leur salon.
La sociabilité sous les projecteurs
Le contre-courant actuel qui prône la reconquête de la convivialité à l’ancienne dans le salon néerlandais est, lui, de nouveau centré autour de la table à manger et guidé par une nostalgie de la période de l’après-guerre, lorsque l’éclairage central placé au-dessus de la table rassemblait les familles. Les grandes tables à manger rectangulaires, positionnées au milieu de la pièce, sont devenues des meubles populaires dans la représentation du désir nostalgique de sociabilité traditionnelle, qui se concentrerait uniquement sur la conversation et le partage du repas, loin de la distraction des écrans. Dans les salles à manger du xixe siècle, éclairées par un lustre suspendu au plafond, le positionnement central de la table n’avait toutefois pas pour objectif de favoriser les relations, mais marquait l’infériorité de statut des domestiques20. En effet, ceux-ci devaient pouvoir se déplacer discrètement autour et servir les convives en restant à distance21. Cet élément constitue donc une des nombreuses illustrations du lien entre les domestiques et le positionnement des équipements techniques, en l’occurrence l’éclairage.
La position centrale des luminaires dans les salles à manger de la classe aisée est également devenue la norme dans les salles de séjour modestes des logements sociaux nouvellement construits dans les années 1920. Elle a donné lieu à un aménagement des meubles similaire, avec la table et les chaises positionnées au centre d’une pièce de petite taille, en dessous d’une seule lampe électrique suspendue au plafond. Lorsque l’espace le permettait, les fauteuils du père et de la mère étaient placés près du poêle, selon le positionnement latéral traditionnel. Dans ces exigus salons néerlandais, un buffet et quelques chaises à dossier haut venaient compléter le mobilier habituel. La table à manger, associée à la lampe qui était la seule source d’éclairage de la pièce, obligeait à une sociabilité étroitement centrée sur le cercle familial Fig. 7. Si les anciennes photos de familles paisiblement rassemblées autour de la table dressée sont peut-être devenues des symboles nostalgiques du fantasme de l’intimité familiale, les jeunes des années 1950 étaient, eux, loin d’apprécier cette promiscuité familiale forcée.
Un film publicitaire des années 1950 réalisé par l’entreprise Philips, fabricant d’ampoules néerlandais, illustre d’ailleurs parfaitement l’insatisfaction de cette classe d’âge. Le premier plan du film montre une famille qui se dispute autour d’une table, où chacun tente d’obtenir le meilleur éclairage, que ce soit pour ses devoirs, la lecture de son journal ou sa couture, mais aussi davantage d’espace personnel. L’harmonie revient dès que chacun possède sa propre lampe standard, qui lui permet de s’isoler dans un coin de la pièce. Ce spot montre ainsi que l’individualisation au sein du cercle familial, critiquée de nos jours, est apparue dès les années 1950 en multipliant le nombre de lampes dans la salle de séjour, qui était encore la seule pièce chauffée de la maison à l’époque.
Dans la littérature de conseil des années 1930, la nouvelle génération d’architectes d’intérieur22 critiquait avec véhémence le positionnement central de la table dans ces salons étriqués, et reprochait cette inefficacité d’agencement aux occupants23. Une critique plutôt ironique, puisqu’au xixe siècle, la table n’était jamais placée au milieu de la pièce dans les logements de la classe ouvrière, mais, à juste titre, contre la fenêtre pour bénéficier le plus possible de la lumière du jour. À la nuit tombée, ce sont des lampes à huile autonomes qui éclairaient la pièce. La croisade des architectes d’intérieur contre l’utilisation inefficace de l’espace voulait non seulement que la table à manger soit déplacée contre le mur, mais aussi que le luminaire quitte sa position centrale pour rejoindre un nouveau point du plafond, ce qui laisserait forcément apparaître le câble de raccordement. Dans la plupart des ménages, la réticence à déplacer la table à manger et l’acceptation tacite de cette inefficacité d’agencement ont démontré que la dissimulation des câbles était devenue une question de statut pour les classes ouvrières également.
Cependant, dès que le point de raccordement au réseau a quitté le centre des salons dans les nouvelles constructions des années 1960, la majorité des ménages a volontiers placé la table à manger rectangulaire devant le mur dans le sens de la largeur. Il était toutefois exclu de remettre la table à sa place d’origine, près de la fenêtre, un agencement associé aux traditions des classes ouvrières. À ce titre, l’aménagement des meubles en relation avec le raccordement au réseau n’était pas neutre, mais bien empreint de considérations de statut.
Mise en lumière d’une controverse
Dans les années 1930, l’interventionnisme des architectes d’intérieur s’est également étendu au design des lampes et des chaises, qui devaient être simples et honnêtes en laissant apparaître leur structure24. Les fameux fauteuils tonneau avec leur assise souple, fleurons des tapissiers, furent mis à l’index parce qu’ils ne révélaient pas clairement leur anatomie, de même que les abat-jours fleuris parce qu’ils obstruaient la clarté et la brillance de l’éclairage électrique. Pour les mêmes raisons, les ampoules jaunes en forme de flamme, ou les imitations électrifiées des lampes à huile étaient prisées pour leur évocation nostalgique du chaleureux clair-obscur du passé25.
À nouveau, la quête moderniste n’a pas récolté un franc succès, comme en témoigne, dans les salons néerlandais de l’après-guerre, la présence de nombreuses lampes murales dotées d’abat-jours décoratifs, les fameuses lampes Twilight. Mais elle a révélé une controverse entre les modernistes, qui préféraient une lumière brillante et crue, et les traditionalistes qui privilégiaient la lumière chaude au ton jaune. Cette dissension perdure encore, car les tenants du moderne favorisent désormais la tendance industrielle déjà citée, avec d’énormes lampes industrielles en verre ou en en acier qui diffusent une lumière froide et brillante depuis de hauts plafonds. Quant aux traditionalistes, ils apprécient la proximité de la lumière jaune et chaleureuse des vraies ou des fausses bougies. En quête d’une solution plus simple à commercialiser, les architectes d’intérieur ont composé une lampe de style industriel en utilisant plusieurs câbles grossièrement enroulés autour d’une poutre en bois, dont chacun se termine par une imitation nostalgique de l’une des premières ampoules électriques. Les filaments jaunes des ampoules créent un ton bien plus doux que les ampoules d’origine, ou les anciennes lampes industrielles dans ce cas précis. Comme dans la plupart des pays occidentaux, les Néerlandais ne sont pas friands de lumière brillante dans leur salon26.
Débarrassées de leur image de Noël, les bougies sont devenues un éclairage d’ambiance prédominant pour marquer l’emplacement souhaité du centre de sociabilité dans les salons néerlandais. Leur position est un indicateur du type de convivialité désiré. Placées sur la table à manger, elles montrent que les conditions sont réunies pour faire émerger une sociabilité centrée, à l’ancienne, posées sur la table basse, dans le coin salon, ou sur la cheminée vide, ou même sur le sol, elles créent l’illusion nostalgique d’un moment où l’on s’assoit près du feu. Leur lumière crée une ambiance romantique, alors que la lumière brillante est associée au travail. Non seulement le positionnement, mais aussi la couleur et l’intensité de l’éclairage sont devenus des codes culturels indiquant les activités prévues dans la pièce.
Individualisation domestique
Ni la place de la table ni la création de multiples recoins confortables éclairés dans le salon n’auront suffi à enclencher le processus d’individualisation domestique. Pour cela, il aura fallu remplacer l’unique poêle situé dans le salon par des radiateurs dans toutes les pièces de la maison. La chambre chauffée a permis aux adolescents de se retirer dans l’intimité de leur propre pièce, même en hiver, pour écouter de la pop sur des stations de radio ou des tourne-disques. Depuis les années 1980, même la chambre des jeunes enfants s’est remplie d’appareils individuels, non seulement les postes de télévision, mais aussi les appareils de karaoké, les lecteurs vidéo, audio et les ordinateurs de jeu27. Plus récemment, la technologie mobile et sans fil des ordinateurs portables, tablettes et smartphones permet aux jeunes de se créer une vie privée individuelle en dehors de la sphère domestique, ce qui met la sociabilité familiale sous pression.
Que ce soit pour regarder des matches de football ou faire un marathon de séries Netflix, c’est la séance de télévision collective qui est devenue un passe-temps apprécié et engendre une nouvelle forme de convivialité familiale. L’aspect informel et la proximité physique du moment où les membres de la famille sont assis proches les uns des autres sur le canapé du salon rend ce nouveau type de relation encore plus intime que la sociabilité centrée d’autrefois. Non seulement la position des spectateurs, face à l’écran, mais aussi le reflet de leurs visages et les contours de l’écran peuvent symboliser cette forme d’interaction réfléchie. En raison de la prolifération actuelle des écrans, celle-ci est largement plébiscitée par la jeune génération, puisqu’elle ne se limite plus à l’intimité du foyer Fig. 8.
Conclusion
Aux Pays-Bas, l’arrêt imminent de l’extraction de gaz naturel ravive plus que jamais le fantasme de l’autarcie. Pendant plus de cinquante ans, ce carburant propre issu du nord du pays a été transporté de manière invisible grâce à un immense réseau de canalisations souterrain pour permettre à chaque foyer néerlandais de se chauffer et de cuisiner, mais aussi pour alimenter les centrales électriques. Alors que la transition initiée par l’État vers une production d’énergie durable progresse lentement, les personnes soucieuses du climat sont de plus en plus pressées d’atteindre leur rêve de foyer autosuffisant, comme en témoigne l’installation de panneaux solaires et d’échangeurs thermiques sur les toits et de pompes à chaleur à l’arrière des maisons. Positionnées à des emplacements discrets, ces solutions indépendantes contemporaines ne sont pas sans rappeler la relégation dont furent à l’époque victimes les domestiques qui faisaient tourner les foyers des classes aisées. Mais c’est par-dessus tout la pénurie de personnel qui eut lieu par la suite qui renforça l’idée du foyer en autarcie, qui relève, encore aujourd’hui, plus d’une douce illusion que de la réalité.
Dans un avenir proche, il n’est pas impossible que des solutions autonomes et durables prennent de l’ampleur en affichant fièrement la conscience écologique des foyers. Dans les intérieurs, l’actuelle tendance du style industriel qui laisse apparaître les fils et conduits aurait été inimaginable par le passé. Jusqu’à présent, cette mode des fils et conduits apparents ne s’est toutefois pas étendue aux câbles et canalisations pénétrant les murs de nos habitations, dont la présence visible mettrait à nu notre dépendance aux équipements externes collectifs. La plupart des gens voient leur maison comme une forteresse impénétrable, qui correspond à l’idéal d’autarcie, alors qu’en réalité, celle-ci ressemble davantage à une éponge poreuse prête à absorber et à rejeter de la matière. La simple idée de porosité de notre foyer nous effraie, ce qui explique pourquoi les contributions des électriciens, chauffagistes et plombiers au confort domestique sont aussi peu abordées.
Cet essai qui porte sur l’impact de l’éclairage électrique et du chauffage central sur le confort du salon montre que les points d’alimentation installés par l’électricien ont déterminé l’emplacement des centres de sociabilité familiale potentiels dans le salon, ainsi que le degré d’individualisation. Non seulement le nombre, mais aussi le positionnement des lampes allumées dans la pièce, sans oublier leur couleur et leur intensité, sont devenus d’importants indicateurs du désir de sociabilité. En installant le chauffage central dans toutes les pièces de la maison, le chauffagiste a permis le développement de l’intimité individuelle au sein du foyer. Mais encore aujourd’hui, notre sens du confort domestique ne tolère pas que ces installations soient visibles. C’est pourquoi les équipements tels que chaudières, tableaux de contrôle et boîtes à fusibles demeurent dissimulés dans nos caves, armoires à compteur et buanderies.
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John E. CROWLEY. The Invention of Comfort: Sensibilities and Design in Early Modern Britain and Early America. Baltimore: The Johns Hopkins University Press, 2001 ; Thomas J. SCHLERETH. « Conduits and conduct: Home utilities in Victorian America, 1876-1915, » chap. 10, in American Home Life, 1880-1930. Knoxville : The University of Tennessee Press, 1992, p. 225-241.↩︎
Irene CIERAAD. « Between sensation and restriction: The emergence of a Technological Consumer Culture, » chap. 10, in Technology and the Making of the Netherlands: The Age of Contested Modernization, 1890-1970. Zutphen : Walburg Press c/o The MIT Press, 2010, p. 542.↩︎
Lucy WORSLEY. If Walls Could Talk: An Intimate History of the Home. Londres : Faber and Faber, 2011, p. 206-218.↩︎
Irene CIERAAD. « Dutch windows: Female Virtue and Female Vice, » chap. 3, in At Home: An Anthropology of Domestic Space. Syracuse, NY : Syracuse University Press, 1999, p. 31-52 ; voir également Lucy WORSLEY, op. cit., p. 196-198.↩︎
Irene CIERAAD. « The Milkman Always Rang Twice: The Effects of Changed Provisioning on Dutch Domestic Architecture, » chap. 8, in Buying for the Home: Shopping for the Domestic from the Seventeenth Century to the Present. Aldershot : Ashgate, 2008, p. 166-169.↩︎
John E. CROWLEY, op. cit., p. 229; Barbara STOELTIE and Rene STOELTIE. « Een kasteel in de Betuwe, » chap. 14, in Romantische huizen in Nederland/Country Houses of Holland/Les maisons romantiques de Hollande. Cologne : Taschen, 2000, p. 104-105 ; Michelle PERROT. « Figures et rôles » in Philippe ARIÈS et George DUBY (dir.). Histoire de la vie privée [1987]. Vol. 4 : De la Révolution à la Grande Guerre, M. Perrot (éd.). Paris: Seuil, 1999, p. 161-165.↩︎
Peter WILLIAMS. « Constituting Class and Gender: A social History of the Home, 1700-1901, » chap. 6, in Class and Space: The Making of Urban Society. Londres : Routledge & Kegan Paul, 1987, p. 155-203 ; Meindert STOKROOS. Verwarmen en verlichten in de negentiende eeuw (Chauffage et éclairage au XIXe siècle). Zutphen: Walburg Press, 2001, p. 101-103.↩︎
Irene CIERAAD. « “Out of my Kitchen!” Architecture, Gender and Domestic Efficiency, » Journal of Architecture, n° 3, 2002, p. 266-279.↩︎
Meindert STOKROOS, op. cit., p. 103-104.↩︎
Victor CONSIDERANT. Description du phalanstère et considérations sociales sur l’architechtonique [Paris, 1834]. Genève : Slatkine Reprints, 1980, p. 67-69 ; Price PRICHARD BALY, Committee for Promoting the Establishment of Baths and Wash-houses for the Labouring Classes (Comité de promotion de l’établissement de bains et lavoirs pour les classes laborieuses). Londres : Effingham Wilson, 1852.↩︎
Irene CIERAAD. « “Out of my Kitchen!”…, art.cité, p. 269-270; Charlotte PERKINS GILMAN. « The Passing of the Home in Great American Cities [1904]. » Heresies, n° 3, 1981, p. 53-55; Lucy WORSLEY, op. cit., p. 217.↩︎
Niels L. PRAK. Het Nederlandse woonhuis van 1800 tot 1940 (La demeure néerlandaise de 1800 à 1940). Delft: Delft University Press, 1991, p. 213.↩︎
Irene CIERAAD. « “Out of my Kitchen!”…», art. cité, p. 271-272.↩︎
Irene CIERAAD. « Droomhuizen en luchtkastelen. Visioenen van het wonen » (Maisons de rêves et châteaux en Espagne. Visions de l’habitat), chap. 6, in Honderd jaar wonen in Nederland 1900-2000. Rotterdam: 010 Publishers, 2000, p. 192-231.↩︎
Irene CIERAAD. « @Home? Students’ visions of Home as Future Trends in Home-Making » chap. 12, in Homes in Transformation: Dwelling, Moving, Belonging. Helsinki : Société de Littérature Finnoise, 2009, p. 313-337.↩︎
Ideaal. « Het ideaal voor elke huisvrouw. Een elektrisch huis der toekomst. Ook de heer deze huizes is niet vergeten [1936] » (L’idéal de toutes les ménagères : une maison électrique du futur, sans oublier le maître de maison), Natuur & Techniek, n°1, 2002, p. 62-64.↩︎
Charles SAUMAREZ SMITH. Eighteenth-Century Decoration: Design and the Domestic Interior in England. New York: Harry N. Abrams Inc., 1993, p. 210 ; Philippe ARIES et Georges DUBY (eds.). Histoire de la vie privée [1987]. Tome 5 : De la Grande Guerre mondiale à nos jours. Antoine PROST et Gérard VINCENT (éd.). Paris : Seuil, 1987, p. 83.↩︎
Irene CIERAAD, « Between sensation and restriction: The Emergence of a Technological Consumer Culture, » art. cité, p. 576.↩︎
Voir également Monique ELEB avec Anne DEBARRE. L’Invention de l’habitation moderne : Paris 1880-1914. Paris/Brussels: Hazan/Archives d’architecture moderne, 1995, p. 104-108.↩︎
Jan WILS. Het woonhuis. II: indeeling en inrichting (La Résidence. iie partie : aménagement et décoration). Amsterdam: Elsevier Uitgeversmij, 1923, p. 40.↩︎
Petrus Berlage, Willem Penaat, Alphons Siebers, Jan Wils et A.H Wegerif.↩︎
Karin GAILLARD. « De ideale woning op papier. Honderd jaar adviezen voor het verantwoorde interieur » (La maison idéale sur papier. Un siècle de littérature de conseil), chap. 4, in Honderd jaar wonen in Nederland 1900-2000. Rotterdam : 010 Publishers, 2000, p. 111-171↩︎
Karin GAILLARD. « Sober Honesty, Comfortable Simplicity. The interior According to Berlage, » chap. 3, in From Neo-Renaissance to Post-Modernism: A Hundred and Twenty-Five Years of Dutch Interiors 1870-1995. Rotterdam : 010 Publishers, 1996, p. 58-83.↩︎
Cornelis VAN DER SLUYS. Onze woning en haar inrichting. Een boek voor allen die belangstelling hebben voor het huis (Notre maison est notre intérieur. Un livre pour les adeptes du chez-soi). Amsterdam : Maatschappij tot Verspreiding Van Goede en Goedkoope Lectuur, 1932, p. 153.↩︎
Mikkel BILLE et Tim FLOHR SØRENSEN. « An anthropology of luminosity: The agency of light, » Journal of Material Culture, n°3, vol. 12, 2007, p. 263-284; Mikkel BILLE. "Lighting up cosy atmospheres in Denmark, » Emotion, Space and Society, vol. 15, 2015, p. 56-63.↩︎
Irene CIERAAD. « Gender at play: Decor Differences Between Boys’ and Girls’ Bedrooms, » chap. 11, in Gender and Consumption: Domestic Cultures and the Commercialisation of Everyday Life. Aldershot : Ashgate, 2007, p. 197-218 ; Dominique DESJEUX, Cécile BERTHIER, Sophie JARRAFFOUX, Isabelle ORHANT et Sophie TAPONIER. Anthropologie de l’électricité. Les objets électriques dans la vie quotidienne en France. Paris: L’Harmattan, 1996.↩︎